Davantage que de sa foi, Jacques Ellul témoigne de son espérance.
Le terme peut paraître aujourd'hui bien désuet.
Ellul affirme pourtant que, face à un monde qui se dérègle toujours davantage car entièrement soumis à l'idéologie technicienne, l'espérance constitue en quelque sorte le fondement de toute résistance sérieuse, le point de départ de toute critique radicale.
Il lui consacre tout un livre[1] : L’espérance oubliée[2].
par Frédéric Rognon (2008) *
L’espérance au temps de la déréliction
L’auteur commence par décrire la mort de l’espérance dans la société technicienne[3] : nous vivons une existence mécanique, et les jeunes, à notre image, n’ont plus aucun projet ni aucune constance dans leurs engagements. Le XXe siècle est le siècle de l’imposture, du mépris et des espoirs bafoués, où tous les idéaux ont été trahis et transformés en leur contraire. Les trois philosophes du soupçon, Marx, Nietzsche et Freud, que Jacques Ellul qualifie de « trois malfaiteurs de l’humanité »[4], nous ont proprement hypnotisés, et leur pensée difficile est malheureusement passée dans le domaine public. De ce fait, plus personne n’a confiance en rien ni en personne, et c’est un sentiment d’impuissance qui s’impose. La suite naturelle du mépris et du soupçon, c’est le règne de la dérision et du reniement de l’homme par l’homme. Or on ne peut continuer à vouloir vivre que si l’on a une espérance. Afin d’expliquer la mort de l’espérance, Jacques Ellul identifie notre époque comme « le temps de la déréliction »[5] : Dieu s’est détourné de nous et nous laisse à notre destin. Il est encore présent dans la vie de certains individus, mais il est absent de notre histoire et de nos sociétés : il se tait. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois, et ce n’est sans doute pas pour toujours : sur les mille quatre cents ans qu’a duré la rédaction de l’Ancien Testament, Dieu n’a parlé que pour huit cents pages…[6] Mais aujourd’hui l’homme se croit majeur, capable d’assumer seul tous ses besoins par la technique, aussi Dieu se tait-il. Son silence n’est pas une punition contre l’homme : s’il se tait, ce n’est pas parce qu’il nous rejette, mais parce que nous le rejetons. Dans la croissance et l’opulence, « vous avez déjà votre récompense »[7], nous dit son silence[8]. Dans le flot sonore qui nous assaille, il n’y a plus de parole décisive possible, et la Parole de Dieu ne veut pas entrer en concurrence de puissance avec les paroles et les bruits des hommes. La déréliction atteint aussi l’Eglise : Dieu s’est retiré de l’Eglise, car « l’Eglise n’est plus l’Eglise »[9]. Avec des accents kierkegaardiens, Jacques Ellul stigmatise l’Eglise qui collabore avec le monde, qui accepte toutes les compromissions, où tout est falsifié, et où le Saint-Esprit est absent : « Si le Saint-Esprit agissait, ça se verrait »…[10] Contrairement aux apparences, l’auteur ne nie pas la nécessité d’une institution ecclésiale, mais considère qu’une institution n’a de valeur que si le Saint-Esprit intervient pour la faire vivre. En l’absence du Saint-Esprit, l’Eglise se conforme au monde.
Après ce tableau particulièrement sombre, Jacques Ellul aborde la question de l’espérance au temps de la déréliction[11]. Car « malgré mon pessimisme bien connu, (…) je ne suis pas désespéré »[12], affirme-t-il. Et même, paradoxalement, le temps de la déréliction est le temps approprié à l’espérance. Jacques Ellul entre alors en dialogue avec Jürgen Moltmann, théologien de l’espérance[13]. Selon Jacques Ellul, Jürgen Moltmann a raison de faire de l’espérance la réalité centrale de la vie chrétienne, puisque toute la révélation est structurée en fonction de la promesse, mais il a tort de croire que la promesse se réalise avec certitude, qu’il y a une sorte de force intrinsèque l’amenant nécessairement à son accomplissement, car c’est une manière d’objectiver l’espérance. En réalité, la promesse est aléatoire, et Dieu ne l’accomplit qu’à l’issue d’un dur combat : la lutte de l’espérance pour contraindre Dieu à sortir de son silence et à tenir sa Parole. L’espérance est donc une réponse de l’homme au silence de Dieu : l’homme qui espère refuse la décision de Dieu de se taire, il revendique que Dieu tienne ses promesses, il en appelle à Dieu contre Dieu. L’espérance est une véritable mise en accusation de Dieu au nom de la Parole de Dieu. Bien plus encore, l’espérance est la dénonciation que le Dieu qui se tait ne peut pas être le vrai Dieu, notre Père, puisqu’il se comporte comme les faux dieux qui sont muets. Ce n’est donc pas le monde qui doit changer, mais c’est Dieu qui doit se repentir pour accomplir sa promesse, en répondant à cette volonté inébranlable qu’est l’espérance des hommes. C’est ainsi que Jacques Ellul comprend la parole de l’Evangile : « Le Royaume des Cieux est aux violents qui s’en emparent »[14]. L’espérance est une violence spirituelle qui consiste à frapper à la porte jusqu’à l’épuisement de nos forces. L’espérance est encore le refus que Dieu ait donné son Fils pour rien. La figure emblématique de l’espérance est le personnage de Job, qui s’insurge contre le silence de Dieu, à cause des promesses de celui qui finira bien par se lever sur la terre, son « go’el »[15]. C’est pourquoi l’espérance ne peut avoir lieu que dans un temps désespéré : au temps de la déréliction.
Espoir et espérance
Jacques Ellul distingue nettement l’« espérance » de l’« espoir »[16]. L’espoir n’a de sens que lorsqu’il y a une issue possible : « Tant qu’il y a de la vie, il y a de l’espoir », car « le pire n’est pas toujours sûr », disent avec raison les adages populaires. L’espérance, au contraire, n’a de sens que lorsque le pire est tenu pour certain. L’espoir est la passion des possibles, l’espérance la passion de l’impossible. C’est pourquoi Jacques Ellul, toute sa vie durant, a tenté de fermer les fausses issues du faux espoir de l’homme, ce que l’on a pris pour du pessimisme : il a simplement voulu rappeler que s’il y a des chances de gagner, l’espérance n’a aucune place, car elle fait appel non à la dernière ressource de l’homme mais à la décision extrinsèque qui seule peut tout transformer. L’espérance ne se réjouit pas de ce que Dieu nous laisse les mains libres, elle exige qu’il parle parce que sans la présence du Tout-Autre, l’homme ne peut aller que de ruines en désastres : elle veut donc le forcer à revenir. L’homme devient libre lorsqu’il décide d’espérer et d’imposer à Dieu son espérance. La seule attitude fidèle à la Croix est la folie qui consiste à provoquer le Saint-Esprit pour que l’espérance soit possible : c’est en quelque sorte l’espérance elle-même qui est espérée[17]. Pour terminer son essai sur l’espérance au temps de la déréliction, Jacques Ellul retrouve ses accents kierkegaardiens d’un foi radicale, ainsi que ses outrances anticonformistes : « Si vous n’êtes pas écorché vif par la déréliction de Dieu, si vous n’êtes pas lacéré jusqu’au plus profond de vous-même par les délais de son retour, alors, inutile de jouer à l’attente et de parler d’espérance. Continuez à construire des autoroutes et à lutter contre les bidonvilles, à faire la révolution et de la théologie, ceci est très bien. Mais il vaudrait mieux ne plus parler de Jésus-Christ et de toute la suite. Ce serait plus honnête »[18].
La subversion du christianisme
Si l’espérance est le cœur de la vie chrétienne, Jacques Ellul se demande pourquoi elle a disparu de l’Eglise. Mais plus largement, il constate que tout ce que l’on qualifie aujourd’hui de « chrétien » n’a plus aucun rapport avec la Bible, qu’il y a même une contradiction radicale entre la chrétienté et le message évangélique. C’est l’objet de son livre peut-être le plus corrosif et le plus décapant : La subversion du christianisme[19]. On accuse en effet le christianisme de crimes qui ne sont pas contenus dans le texte d’origine, et on réinterprète la Révélation à partir de la pratique de la chrétienté. C’est pourquoi Kierkegaard non seulement distinguait nettement, mais opposait foncièrement « christianisme » (c’est-à-dire le message du Nouveau Testament) et « chrétienté » (c’est-à-dire la société qui en est issue, mais qui en réalité l’a trahi)[20]. Jacques Ellul préfère désigner par le terme de « christianisme », du fait de son suffixe en « -isme », la Révélation subvertie (ce que Kierkegaard appelait « chrétienté »), et réserver pour signifier la pure Révélation biblique (ce que Kierkegaard appelait « christianisme du Nouveau Testament ») la simple lettre « X ». Alors que le Christ et le X sont révolutionnaires, hostiles aux pouvoirs, à l’argent, à la violence, à la morale, aux cultures et aux religions, le christianisme est antirévolutionnaire : il est devenu une religion, avec une morale infantilisante, un conservatisme politique, économique et social. Et il s’est imbibé au cours de l’histoire de toutes les cultures : le christianisme a été platonisé, puis aristotélisé, puis rationalisé, puis marxisé, et demain islamisé… Cette trahison du X par le christianisme est en quelque sorte un renversement du renversement, une subversion de la subversion[21].
Jacques Ellul décline ensuite les différents domaines de la subversion. Alors que le discours biblique est « athéologique »[22], l’élaboration d’une théologie chrétienne a conduit à penser le contenu de la Révélation dans une forme qui lui est étrangère, essentiellement grecque. En changeant le signifiant, on subvertit aussi le signifié[23]. La conversion de Constantin a par la suite subverti le X au moyen de la politique : la rançon de son succès a été sa mise en conformité avec la société qu’il aurait dû subvertir. De fait, l’enrichissement de l’Eglise l’a transformée en institution sclérosée[24]. A force de prospérer, le X a décliné : Jésus avait enseigné la vie en communauté de frères et sœurs, mais la masse ne peut être organisée sur le mode communautaire. Lorsque la société entière devient chrétienne, il faut instituer une morale, et le baptême d’enfants suffit à sanctionner l’entrée dans l’Eglise. Ne pouvant évaluer la foi, on évalue les mœurs. Ainsi la Révélation est subvertie pour la rendre acceptable par tous[25]. Alors que la pensée biblique a désacralisé tout ce qui n’est pas Dieu, la victoire du christianisme sur le paganisme a eu pour effet le transfert sur le vainqueur de ce qui appartenait au vaincu : la resacralisation de la nature et de la société, des lieux et des temps, des prêtres et des objets, des rites et des sacrements[26].
Aujourd’hui, le christianisme est réduit à une morale et à des fêtes. Or la Révélation de Dieu n’a absolument rien à faire avec une morale, elle est même « une antimorale »[27]. L’enseignement de Jésus est existentiel et non moral, c’est pourquoi il attaque les pharisiens, qui sont des hommes très moraux, mais qui obéissent à leur propre morale. Et il sera condamné par les plus moraux des hommes. Contrairement à l’idée reçue, « il n’y a pas de morale chrétienne »[28], au sens d’un système de préceptes universels. Jésus a substitué l’amour à la loi : le service désintéressé du prochain à la relation de devoir et d’interdit. Alors que Paul, contrairement aux clichés, valorise la femme, au point de demander à son mari de donner sa vie pour elle[29], le christianisme est devenu un antiféminisme virulent, ce qui est un contresens total. De manière significative, les théologiens les plus préoccupés par la morale sont les plus phallocrates. L’Eglise a choisi l’esprit de contrainte et de domination et a rejeté l’Evangile, c’est pourquoi elle a éliminé la femme, notamment par le célibat des prêtres. La Révélation a donc été subvertie en morale[30].
Mais la subversion ne s’est pas arrêtée là. L’influence de l’islam sur le christianisme a été considérable du neuvième au onzième siècle. Les liens entre Eglise et pouvoir politique, la juridicisation de la chrétienté, et l’adoption de la guerre sainte, sont les fruits d’un mimétisme : la Croisade est l’exacte réplique du Djihad. Lorsqu’on lutte contre un adversaire avec les mêmes armes que lui, on s’identifie à lui, et la juste cause est corrompue par les moyens injustes : la non-violence de Jésus se transforme en guerre pour lutter contre la guerre menée par l’adversaire, et comme celle-ci est une guerre sainte, la nôtre le devient aussi. Ce fut assurément l’une des perversions majeures de la foi en Jésus-Christ et de la vie chrétienne. Mais il en est d’autres : l’entrée dans la communauté croyante par la simple naissance, le développement de la mystique, la soumission aveugle à Dieu, l’asservissement de la femme, le développement de l’esclavage, ainsi que la colonisation, toutes ces pratiques sont des inventions de l’islam. L’immense culpabilité des chrétiens a été d’imiter l’islam[31].
Alors que la conception biblique de la politique de l’Etat n’est pas apolitique mais « antipolitique » et « antiétatique »[32] (refusant de doter la politique d’une quelconque valeur et surtout d’idolâtrer l’Etat), à partir de la conversion de Constantin, l’Eglise s’est laissé séduire, trahissant ainsi son Seigneur qui avait refusé la tentation de Satan[33]. Le texte « accidentel »[34] de Romains 13 est devenu dans l’Eglise le texte absolu concernant l’Etat, justifiant toute violence. De persécutée, l’Eglise devient persécutrice, et se transforme en appareil de propagande au service de l’Etat : monarchiste sous la monarchie, républicaine sous la République, hitlérienne sous Hitler, communiste sous le communisme, ou soutenant le pouvoir montant pour ce qui concerne les théologies de la libération. Au Vatican, l’Eglise devient même un Etat, ce qui est la perversion suprême[35].
Pourquoi donc cette subversion du christianisme dans tous les domaines ? Parce que la Révélation est un scandale intolérable, non seulement intellectuellement mais socialement : sitôt que le christianisme est pris au sérieux, il devient « impossible de faire fonctionner une société »[36]. Mais l’Evangile n’est pas seulement insupportable pour la vie sociale, il ne peut être toléré par le cœur de l’homme : la grâce « ruine un fondement du psychisme humain »[37]. L’homme a besoin de religiosité, de sacralisation, d’autojustification, de sacrifices, d’autonomie, de maîtrise de son Salut, de certitudes, de stabilité, de sécurité… Comme les Hébreux au désert[38], il préfère tout subir plutôt que d’accéder à la liberté. Telle est la première source de la subversion du christianisme[39].
Mais la perversion du christianisme tient aussi aux puissances spirituelles, qui font de la terre un Enfer, détruisant tout ce que Jésus est venu apporter, brisant la relation de l’homme à Dieu et celle de l’homme à l’homme. Derrière toutes les formes de subversion du christianisme, il y a la main du diable : derrière l’argent qui a corrompu l’Eglise, derrière l’Etat qui a séduit les chrétiens, derrière le mensonge, la division et l’accusation, il y a le prince du mensonge, le diviseur et l’accusateur. La subversion du christianisme a consisté à se laisser pénétrer, séduire et conduire par le prince de ce monde. Les puissances ont remporté une victoire explosive contre le Saint-Esprit, asservissant à leur grandeur la vérité même de Christ[40].
Et pourtant, Christ ressuscité est avec nous jusqu’à la fin du monde, le Saint-Esprit agit dans le secret, l’Eglise naît et renaît sans cesse, non pas en tant qu’institution, mais en tant que corps de Christ. Et la Révélation trahie continue à se transmettre et à inspirer et transformer des vies. Dieu a posé des limites à la subversion de sa Révélation. Et lorsque la Parole de Dieu se fait à nouveau entendre, se produit une transgression de la transgression, une subversion de la subversion. La subversion porte immanquablement en elle-même sa propre subversion[41]. Donc rien n’est jamais clos ni perdu : « Le christianisme ne l’emporte jamais décisivement sur Christ »[42].
Nous verrons dans les relectures que Jacques Ellul opère des œuvres qui l’inspirent, le rôle décisif que joue ce renversement ultime du christianisme institué : ce que nous pourrions appeler, en prolongeant le raisonnement de notre auteur, « la subversion de la subversion de la subversion… »
Christianisme et Occident
Jacques Ellul n’a cessé de s’interroger sur le mystère de la rencontre entre le christianisme et l’Occident. Dans son ouvrage intitulé Trahison de l’Occident[43], il se demande pourquoi le christianisme s’est diffusé à l’Ouest, alors que la logique aurait été au contraire une diffusion vers l’Orient[44]. On a dit que le christianisme a pu se répandre aussi rapidement parce que Rome avait unifié le monde connu, mais les possibilités de communication matérielle ne représentent rien auprès de la contradiction de l’esprit : l’Occident est l’inverse de tout ce que Dieu nous fait vivre en Jésus-Christ, tandis que l’Orient est un monde beaucoup plus spirituel. La réponse de Jacques Ellul relève donc de la foi et non de l’analyse sociologique : Dieu a engagé le combat au centre de la puissance de l’homme, et l’Occident est devenu le lieu du combat spirituel le plus radical. C’est la lutte entre Eros (la volonté de puissance sans limites) et Agapè (l’amour inconditionnel). De ce fait, l’Occident n’a jamais pu s’achever puisqu’il était attaqué par l’Evangile qui sapait toutes ses constructions, mais inversement le christianisme n’a jamais pu être lui-même parce qu’il était empêtré dans un ensemble de systèmes qui tendaient sans fin à l’assimiler. Aujourd’hui, cependant, le fragile équilibre éclate : depuis deux siècles, avec la croissance technicienne et politique, l’Occident a accompli un pas de géant en direction de l’Eros, et il « se meurt d’avoir gagné sur Dieu »[45].
Le nouveau sacré
Selon Jacques Ellul, la foi et l’espérance permettent néanmoins au chrétien de continuer à vivre dans la société technicienne, mais de cesser d’en idolâtrer les mythes : la croissance, le progrès, l’Etat-Providence, la réussite professionnelle, l’argent, la politique, la Révolution, les sports et les loisirs, les médias et notamment l’informatique. Celui qui est libéré en Christ peut utiliser toutes les techniques dont il dispose, mais avec une distance critique, il cesse d’être fasciné et subjugué. L’objet de sa foi et de son espérance est ailleurs. Ce ne sont donc pas la technique ni l’Etat qui nous asservissent, mais leur adoration qui nous retire toute fonction critique. Jacques Ellul met cependant le chrétien en garde. Dans son livre intitulé Les nouveaux possédés[46], il s’inscrit en faux contre les théories de la sécularisation, pour montrer que l’homme moderne est aussi religieux que jamais, qu’il est sorti du christianisme mais non du sacré. Le comble de l’aliénation, qui interdit toute distanciation à son égard, tient à ce que ce sacré a même été transféré sur l’objet désacralisant : la technique[47]. Or, les mythes aliénants des religions séculières ont une fonction capitale : ils permettent à l’homme d’assumer sa difficile condition dans cette société sans issue. Les détruire par une désacralisation radicale, ce serait prendre la responsabilité d’acculer l’immense majorité des hommes à la folie ou au suicide. Le chrétien ne doit donc le faire que si, en même temps qu’il désacralise, il annonce à ses contemporains une raison de vivre qui effectivement fasse vivre : une espérance qui ne soit pas une mystique désincarnée (ce qui produirait une nouvelle aliénation), mais qui permette de vivre lucidement ici et maintenant[48].
* Cet article reprend le chapitre L’art dans la société moderne : l’empire du non-sens de l’ouvrage de Frédéric Rognon : Jacques Ellul. Une pensée en dialogue, Genève, Labor et Fides (coll. Le Champ éthique, n°48), 2007, p. 63-69.
[1]. Cf. ibid., p. 181.
[2]. Cf. JE, 1972b.
[3]. Cf. ibid., p. 13-75.
[4]. Ibid., p. 58.
[5]. Cf. ibid., p. 77- 154.
[6]. Cf. JE, 1994, p. 165.
[7]. Cf. Mt 6,2 ; Lc 6,24.
[8]. Cf. JE, 1987b, p. 197-198.
[9]. JE, 1972b, p. 132.
[10]. Ibid., p. 135-136.
[11]. Cf. ibid., p. 165-216.
[12]. Ibid., p. 165.
[13]. Cf. Jürgen Moltmann, Théologie de l’espérance. Etudes sur les fondements et les conséquences d’une eschatologie chrétienne, Paris, Le Cerf, 1970.
[14]. Mt 11,12.
[15]. Cf. Jb 19,25.
[16]. Cf. JE, 1972b, p. 188-195.
[17]. Cf. ibid., p. 273-274.
[18]. Ibid., p. 255.
[19]. Cf. JE, 1984a.
[20]. Cf. SK, « L’école du christianisme », OC XVII, Paris, Editions de l’Orante, 1982, p. 1-231 ; « L’Instant », OC XIX, Paris, Editions de l’Orante, 1982, p. 93-313.
[21]. Cf. JE, 1984a, p. 25-32.
[22]. Ibid., p. 45.
[23]. Cf. ibid., p. 45-46.
[24]. Cf. ibid., p. 46-55.
[25]. Cf. ibid., p. 58-74.
[26]. Cf. ibid., p. 83-107.
[27]. Ibid., p. 109. Cf. JE, 1964b, p. 73.
[28]. JE, 1984a, p. 109. Cf. JE, 1964b, p. 72.
[29]. Cf. Ep 5,25.
[30]. Cf. JE, 1984a, p. 108-147.
[31]. Cf. ibid., p. 148-174.
[32]. Ibid., p. 176.
[33]. Cf. Mt 4,8-10 ; Lc 4,5-8.
[34]. JE, 1984a, p. 191-192.
[35]. Cf. ibid., p. 175-210.
[36]. Ibid., p. 243.
[37]. Ibid., p. 245.
[38]. Cf. Nb 11,4-6.
[39]. Cf. JE, 1984a, p. 237-266.
[40]. Cf. ibid., p. 267-291.
[41]. Cf. ibid., p. 292-324.
[42]. Ibid., p. 324.
[43]. Cf. JE, 1975b.
[44]. Cf. ibid., p. 64-76.
[45]. Ibid., p. 75.
[46]. Cf. JE, 1973.
[47]. Cf. ibid., p. 115-118, 253-256.
[48]. Cf. ibid., p. 317-318.
* Cet article reprend le chapitre L’espérance de Jacques Ellul : au delà de l'espoir de l’ouvrage de Frédéric Rognon : Jacques Ellul. Une pensée en dialogue, Genève, Labor et Fides (coll. Le Champ éthique, n°48), 2007, p. 101-110.
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Ouvrages et articles majeurs de Jacques Ellul
L'espérance oubliée 1972
L’espérance déformée 1973
L’espérance en action 1973
L’espérance et la mort: résurrection: notre accomplissement 1974 Réforme, 19 octobre ; réédition : 2004
Vivez l’espérance 1979 Paix et liberté
L’espérance et la mémoire 1979 Sud-Ouest Dimanche, réédition : 2007
Jacques Ellul, théologien de l’espérance 1981 Le Quotidien de Paris
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